Aélith de Rosaeraille - Rodeur, oiseau de malheur

An 30 - Lorsqu’elle se réveilla ce matin là, elle était habitée d’un profond malaise. Ceux dont on ignore la source exact mais soupçonne un rêve amer. Les oiseaux avaient beau s’époumoner, elle restait allongée, encore épuisée, jusqu’à ce que le sommeil daigne à nouveau l’accueillir. Et que ses paupières tombent lourdement sur son regard azur. Elle replongea alors dans ce rêve qui l’avait inconsciemment chagrinée. Il avait pour thème son enfance, elle ne cessait d’ailleurs de l’obséder. Elle revivait des scènes anodines et pourtant si vives en sa mémoire. Les moments clés de son passé s’avéraient flous, sans doute brouillé par l’émotion. Tout était à l’identique, excepté sa personne. Elle n’était plus une gamine, mais une femme accomplie. Cependant aucune logique ne régissait la scène dont elle était l’héroïne, il s’y mélangeait des évènements récents et allusions au présent.
Elle était en face de la forêt, accompagnée d’un jeune homme dont le souvenir la hantait encore aujourd’hui. Il s’évertuait à lui apprendre à tirer. Il rigolait sans cesse à ses frasques puériles. Mais il était beau, si beau et majestueux que son souvenir devait être erroné.

Aélith, ne sois pas si butée. Regarde !
Je sais très bien tirer, merci .

Elle bondit des herbes dans lesquelles elle se prélassait pour lui arracher l’arc des mains. Il fut surpris mais ne releva pas la brusquerie. Elle saisit une flèche du carquois de cuir posé au sol et visa la cible incrustée au tronc d’un arbre en étirant difficilement la corde de l’arme. A la voir s’appliquer si consciencieusement malgré les difficultés qu’elle bravait, il ne pu réprimer un sourire. Elle n’eut le temps de mieux s’investir, car ses bras frêle lâchèrent prise. La flèche fendit l’air comme un diable et se perdit dans la noirceur du bois. Alors qu'elle s'y engouffrait, un cris lancinant, quasi surnaturel s'éleva des ténèbres. Ils ne semblèrent cependant pas l'entendre. Son piètre tir fut quant à lui ponctué par le rire larmoyant du jeune homme. Elle rougit, et se renfrogna.

Tu es la pire gosse que j’ai rencontré. Maintenant tu va m’écouter … Les rires cessèrent. Je ne serais pas toujours là dit-il en caressant affectueusement la chevelure immaculée d’Aélith. Il la couvait d’un regard compatissant qui transpirait l’affection. Et je veux que tu puisse te défendre. Tu n’es pas destinée à dépendre d’un autre, pas destinée à être malheureuse.

De ses pupilles innocentes, elle comprenait son discours malheureusement les sentiments et le message qu’il voulait lui transmettre n’étaient pas aussi clairs. Ils restèrent un instant figé à se regarder sans se comprendre. Elle tendit une main douce et sincère vers la sienne, et l’agrippa fermement.

Mais je suis forte, et je le resterais. Tu parles comme ci tes jours étaient compté. Tu vas partir ?
Non … Je l’ignore. Juste un pressentiment, rien dont tu dois t’inquiéter.
Ne pars pas, je dois te chercher maintenant.

Elle s’éveilla brusquement, empoignée par l’anxiété. A présent elle se rappelait des détails, cet instant paisible de son existence la rendait mélancolique. Elle aurait préféré ne pas s’en souvenir, il lui faudrait ce matin lutter pour ne plus y penser et retrouver une once de bonne humeur. Ses longs doigts s’égarèrent et frottèrent ses joues parsemées de taches de rousseurs, elle repartirait dés que son équipement serait empaqueté. Sa couchette ne cessait de lui renvoyer ces mauvaises images contre son gré.

An 23 - Le pressentiment s’avéra, il partit l’année suivante pour le front. Le bouclier est tombé, les lignes armées protégeant la cité s'amenuisaient. Un appel aux recrues avait donc secoué tous les villages environnants. Accepter la requête lui avait paru essentiel, un devoir pour le pays, une preuve de courage. Il était partis, pied à l’étrier sans un mot ni un regard. Elle se souvient du déchirement qui avait secoué sa carcasse fluette lorsqu’il s'était éloigné sur le sentier de rocaille. Elle le fixait intensément, avec pour seule envie qu’il lui accorde une dernière attention. Mais il n’en fit rien. Son cœur avait beau battre à s’en décrocher, il ne se tourna pas une seule fois en signe d’adieu. Pourquoi ne souhaitait-il pas croiser ses iris azur ? Elle l’ignore. Sans doute était-il conscient que leur séparation n’en aurait été que plus dramatique. Aélith se contenta donc de l’observer, le cœur lourd. Debout devant l’auberge familiale, les poings crispés, la tête inclinée. Il n’était qu’un homme de passage. Leur première rencontre s’était déroulée à cet endroit précis. Elle l’avait vu s’avancer avec hésitation dans la pénombre. Il se présenta comme un voyageur épuisé, et réclama le gîte. On lisait en son franc parler qu’il était un garçon de bonne famille, sa bourse confirmait d’ailleurs ses dires. Aélith avait plaisir à l’interroger, et sans cesse accablé de questions le jeune homme ne bronchait pourtant pas. Si bien qu’elle finit par connaître le récit de sa vie par cœur. Il aimait lui raconter ces histoires, lui qui était trop pudique pour les évoquer à d’autres. Les jours devinrent des semaines, les semaines des mois et il élu domicile à l'auberge en échange de compensations moindres . A savoir l'éducation d'Aélith, l'aide aux taches ménagères, ... Ils ne passèrent que onze mois ensemble, ce temps suffit à les rapprocher. Il fit durant ce laps de temps office de figure paternel, compensant la perte de ce dernier. Mais aujourd’hui il partait sans un mot, ni un regard. La scène était incompréhensible. L'affection qu'elle lui portait était-elle démesurée face à la sienne ?

La fragilité du cristal ne le rend pas faible, elle le rend délicat

© Apokalypto

An 25 - Les années passèrent, sans que son idole ne se manifeste. Son quotidien ne changea point, la banalité incarnée. Elle aidait sa mère de journée, et certains soirs s’entraînait, souvent par plaisir, à diverses disciplines. Le contexte du pays ne s’améliorait pas, malgré toutes les vies perdues et le sang versé. A son tour, elle en vint à désirer un changement et concrétisa la décision qui lui occupait l’esprit depuis longtemps. Elle s’aventura dans le bois plus profondément et ne revint plus. Elle avait préalablement prévenu sa mère par de multiples allusions à son départ imminent. Mais elle sait que sa disparition heurta tout de même sa génitrice de plein fouet. Cependant les enfants ne restent pas éternellement. N’est-ce pas ?
Elle s’était grandement surestimée quant à ses facultés de survie. Elle réussissait à peine à échapper au jour, la nuit était un calvaire. Il n’y avait de réel repos, sans cesse elle devait être sur ses gardes. Parce qu’il existe, dissimulé sous la pénombre des feuillages, des créatures méconnues dont elle se savait incapable de repérer la présence. Elle s’endurcit évidemment, mais ce rythme soutenu finis par la fatiguer moralement et altérer quelques peu sa santé mentale. Par chance, après des semaines où la jeune effrontée voulut survivre par ses propres moyens, eut lieu une rencontre.

Ondulant tant bien que mal entre les hautes herbes, écartant les ronces qui écorchaient ses jambes dénudées, elle commençait à s’essouffler. Il y avait des jours qu’elle marchait, elle finissait par oublier la raison de son départ. Chaque heure, l’envie de rebrousser chemin lui martelait plus violemment la tête. Qu’était-elle partie chercher dans cette végétation sauvage ? Un bien être qui n’y était manifestement pas. Elle n’aspirait plus qu’à dénicher un lieu douillet, où elle pourrait souffler un instant. Dormir sur le sol froid, humide et inconfortable ne lui convenait plus. La nourriture ne manquait pas, certes, mais les condiments était aux abonnés absents. La nature était indomptable, elle ne se sentait plus capable de lutter ou d’y adhérer. Elle s’arrêta entre deux troncs et jeta au sol ses imposants paquetages. Ses muscles s’engourdissaient, son dos la martyrisait.
Un craquement la mit soudain en alerte, le bruit d’un projectile ensuite la conforta dans sa paranoïa. Elle n’eut le temps ni de courir, ni d’esquiver. Une douleur aiguë vint lui tirailler la gorge. Sa peau lui brûla et se déchiqueta. On venait de la tirer comme un lapin, heureusement la flèche n’avait touché sa cible que partiellement. Elle avait effleuré sa chair, et une face de la lame seulement l’avait entaillée. Elle eut le réflexe de poser une main sur la plaie ensanglantée. La fraîcheur de ses doigts apaisèrent légèrement la souffrance, et permirent à ses jambes ramollies par le choc de se mouvoir. Abandonnant ses affaires, elle prit la fuite mais bien vite elle sentit qu’on la retenait. Une poigne ferme avait agrippé son col, et l’entraînait inexorablement vers l’arrière. Elle poussa un cris étouffé par l’entaille brûlante et tomba misérablement dans des fougères. Elle s’attendait à mourir, quand sa chute fut accompagnée d’un rire gras. Stupéfaite, elle hésita à se relever. C’était bien la dernière réaction qu’elle attendait d’un homme qui avait tenté de la tuer quelques secondes auparavant. Elle n’eut besoin de prendre d’initiative, que déjà on la remettait sur pied avec une facilité déconcertante. L’homme qui lui faisait face était beaucoup plus âgé, la trentaine à vue de nez. Il était vêtu d’une armure en cuir bouilli, et emmitouflé dans une cape au tissu lourd et sombre.

Qu’est-ce qu’une gamine fait seule dans les bois ?

Sa voix était rauque, elle lui procura des frissons. Incapable de répondre, ses doigts se crispèrent de plus belle sur cette gorge souillée par l’hémoglobine et elle prolongea le silence. L'homme renifla nonchalamment et écarta brusquement son poignet pour visualiser la plaie. Mais elle ne manifesta aucune objection, ses pensées s’étaient figée à l’instant où la flèche l’avait touchée. Il ne paru pas s’inquiéter malgré le sang qui se déversait de celle-ci.

On va d’abord soigner cette vilaine égratignure, les explications peuvent attendre.

Consciente qu’il allait à nouveau la ballotter telle une marionnette, Aélith dégagea son poignet avec agressivité. L’homme fut surpris, mais ne prit pas le geste comme un refus. Il rattrapa son bras et l’emmena en direction de son campement. Souvent on lui avait appris à se méfier de ces hommes sauvages, ces rôdeurs. De toutes les terribles histoires qu’on lui conta à leur sujet. Certaines étaient justes, mais la plupart n’étaient que peur et mensonge. Sans doute eurent-ils pitié de l’enfant qu’elle était car ils la prirent sous leur aile. Ou plus incroyable, comprirent-ils en un regard qu'elle était la fille d'un des leurs. Ainsi cette mésaventure lui permit de rencontrer le peuple en marge de la société, qu'elle considéra par la suite comme sien.

Il est au sein des bois un charme solitaire, un pur ravissement aux confins du désert, et de douces présences où nul ne s’aventure au bord de l’océan qui gronde et qui murmure.

Dépourvue d’un équipement valable à ces débuts, Aélith s’est vite enrichie. Ces nombreux voyages lui ont permis de collectionner les armes de qualité et le matériel pratique nécessaire. Pour transporter tous ces petites babioles, on lui offrit une monture à la robe Azelan. Son origine est plutôt louche, dérobée à un fermier ou un noble des environs. Mais elle n’en a cure, ce cheval est essentiel et le lien qu’elle a tissé avec lui s’approche de la symbiose. Elle possède donc trois besaces en croûte de cuir. L’une contenant l'attirail de survie : une gourde, des silex, du tissus ... L’autre est réservée au stockage d’herbes et de vivres, elle contient quelques bocaux pour préserver la fraîcheur de ses rares acquisitions et une faucille de bonne qualité chipée à un bon prix chez un marchand ambulant. Etant une jeune femme « faible » Aélith privilégie les armes légères. Elle affectionne tout particulièrement la hache d'arçon à double face, la sienne est courte mais aussi tranchante et meurtrière qu’une épée de maître. Elle n’est cependant qu’une arme défensive. Pour cette raison, elle possède un arc assez imposant allant de pair avec un carquois de cuir. Elle le manie mieux que tout autres armes. Il lui sert également pour la chasse. A sa selle de cuir est attachée une casserole de bronze et autres ustensile de cuisine.
Sa silhouette est brouillonne et sauvage. Aélith porte une armure de cuir bouilli qui remonte haut et protège la sensible cicatrice de sa gorge. Bras et jambes sont cependant dénudés. Elle se couvre souvent de peau de bête, le climat en forêt est humide et froid. Elle renforce les traits candide de sa figure par des peintures tribales, pour éviter de paraître trop fragile et de devenir une proie.

Pseudo : Unfair jealousy
Âge : 18 ans
Sexe : Féminin
Comment avez vous découvert le forum? un peu par hasard, en me baladant de forum en forum .
Ce que vous aimeriez dire pour conclure : Et Pif j'ai accroché à l'univers, je veux en être